Avant: La pensée
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La réflexion qui a rendu Carnac possible a ouvert la voie à quelque chose de nouveau, non pas en matière d’alimentation et d’autosuffisance, mais dans une échelle intellectuelle.
Les rangées de pierres – si vous ne les avez jamais vues et que vous n’avez jamais marché sur toute leur longueur, vous ne pouvez pas en avoir une impression ! Vous ne pouvez pas imaginer ce que Carnac signifie ! C’est-à-dire, il vous manque une expérience non pas seulement sentimentale, mais primordiale.
L’esprit échappe à l’étroitesse.
Cette gigantesque fresque de pierres s’envole pratiquement dans la plaine et se perd à l’horizon. Les rangées se détachent de la forme strictement ronde et de la forme étroite des dolmens et des cairs et mènent ainsi à une libération d’esprit de grande envergure.

Il échappe de l’étroitesse, qui s’épanouie dans sa propre vision, comme un cercle, qui tourne en rond. La pensée s’aventure dans de nouveaux espaces.
La région bretonne se caractérise aujourd’hui par un grand nombre de pâturages et de plaines forestières. L’esprit libre peut dans ce pays errer loin et se perdre dans des contrées lointaines. Les immenses rangées de pierres absorbent cette sensation et la traduisent en forme géométrique.
Le vent joue avec les bords des morceaux de roche érigés – grésillant, sifflant, harmonieusement.
Nous ne saurons jamais, s’il était déjà clair au début de la planification des rangées de pierres, que ces lignes devaient être tirées si loin dans la plaine, comme il est le cas aujourd’hui. Il en va de même pour la question de savoir si ce qui fut réalisé est le contenu intégral de ce qui a été planifié. Mais le résultat, ce qui fut finalisé, est d’une qualité impressionnante et aura éblouie les habitants ainsi que les visiteurs de l’époque, lorsqu’ils se déplacèrent entre les colonnes silencieuses. Il est possible que le vent ait joué avec les bords et pointes déchiquetés des morceaux de roche érigés – grésillant, sifflant, harmonieusement.

Non seulement la longueur des rangées est surprenante, mais aussi leur nombre. Si deux ou trois lignes s’étaient côtoyées, plus ou moins à la même distance, cela aurait déjà fait de l’impression. On aurait pu penser à une coïncidence, à un ébat, auquel les esprits d’antan se seraient livrés lorsqu’ils se sont mis en route pour réaliser leur miracle.
Si vous épluchez les chaînes de menhirs, le regard s’ouvre non seulement sur la longueur.
La succession des pierres d’apparence sobre se pose comme une large bande dans le paysage. Si vous épluchez les chaînes de menhirs, si vous êtes au milieu d’elles, votre regard s’ouvre non seulement sur la longueur mais aussi sur la largeur.
Cette largeur conduit au fait que l’observateur, en regardant autour de lui, à gauche et à droite, en avant et en arrière, est soudain à la merci du sentiment d’être dans une forêt de géants, de blocs et de nains, qui se sont tous immobilisé dans une position précise, lié d’une structure de matériaux identiques.

Vue de près, cette forêt clairsemée, qui n’est pas faite de bois mais de pierre, apparaît comme si le hasard avait méticuleusement déterminé l’emplacement de chaque pièce monumentale qui présente en même temps un aspect individuel. Le hasard ? Non, ce n’est pas le cas. L’orientation en avant et en arrière, de même sur les voies latérales transmet à l’observateur stupéfait, surtout s’il change de deux ou trois mètres de position, un autre message. La perspective géométrique changeante affecte l’esprit comme un jeu d’ombres en mouvement constant et révèle la première impression comme une illusion.
À chaque prise de vue supplémentaire le sentiment naît que les rangées créent un ordre différent dans la propre pensée.
À chaque prise de vue supplémentaire qui est dirigé à travers les alignements, le sentiment naît que les rangées de pierres sont constamment rajustées et qu’elles créent de cette manière à tout moment un ordre différent dans la propre pensée de l’observateur médusé. La masse des pierres, leur nombre, leurs formes répétitives et les étirements impeccables, qu’elles constituent, engendrent une structure claire dans l’esprit. Un pas de plus, et le visiteur a l’impression que cet ordre s’effondre à nouveau. Du moment, on a l’impression que l’on soit encore une fois sur le point d’être assommé par les puissants rochers.
Il faut se rappeler, que, selon les déclarations des chercheurs et fouilleurs de l’antiquité, les gens d’autrefois étaient de plus petite taille que nous, les habitants actuels du globe, et c’est pourquoi les grands menhirs, mais aussi les plus petits, plus délicats, semblaient encore plus impressionnant qu’à nous aujourd’hui, qui nous nous tenons remplis de surprises parmi cet amassement d’étonnantes pierres.
La multitude de menhirs permet des vues très différentes.
Les avenues de pierre bien soignées invitent à la promenade. Ce ne fut pas seulement un exploit d’apporter les nombreuses pierres sur le site et de les installer. Au contraire, une nouvelle entreprise a suivi, dont l’idée principale ne fut pas donnée par les tumuli, les cairns et les dolmens, mais par le menhir érigé et sa signification. Le menhir représentait la vie, la multitude de menhirs, dressé en rangées, un nouvel ordre, un ordre cependant, qui brise la ligne droite unique de menhirs par une multitude de différentes rangées et permet ainsi des prises de vue très variées grâce aux multiples files de pierres.

Non seulement le nombre d’enfilades en parallèles et de pierres ont un effet stimulant sur la pensée et le cerveau. À l’ouest, il y a d’énormes rocs. Vers l’est, ils deviennent de plus en plus petits et gracieux, plus ils s’éloignent du centre. Ils permettent même au spectateur de voir les différentes lignes de blocs de pierre en raison de la hauteur de pointes considérablement réduites des monuments. Les rochers du début du parcours, qui, par leur masse et leur taille, captent toute l’attention du spectateur, font, plus le visiteur s’avance vers l’est, place à des structures plus dégagées qui fournissent soudainement une vue d’ensemble et de la clairvoyance, ouvrant ainsi un nouvel espace pour des réflexions rajeunissantes pour un esprit vif.
Cette libération de la pensée se concrétise parce que l’homme a habilement utilisé une irrégularité du terrain.
Carnac offre encore d’autres surprises. La topographie du site permet à un endroit précis une vue plongeante sur ce lieu d’importance culturelle et historique. Là où le ruisseau au nom coquet de Kerloquet a creusé une vallée dans la plaine, l’observateur regarde d’un point élevé vers l’autre versant du petit talus et remarque, stupéfait, qu’il découvre à ses pieds une quantité de menhirs qui semblent se précipiter sur une colline. Cela signifie que l’homme, qui se trouve sur un emplacement plus élevé que les pierres, a l’air de contrôler le lieu en ayant la vue d’ensemble, alors qu’au début des alignements la pierre contrôle l’homme.
Cette libération de la pensée se concrétise parce que l’homme d’antan a habilement utilisé une irrégularité du terrain, un vallon, pour aménager ces espaliers en pierre. Ainsi, les constructeurs de ces galeries ancestrales offrent une nouveau débouché grâce à leur création agile.

Ce lieu, que le visiteur atteint après avoir parcouru près de trois kilomètres à travers les colonnes de pierre, offre sous l’angle d’une mouette, qui survole le terrain et dont il y en a beaucoup dans la région, une vue sur une foule de figurants en pierre, qui montent une rampe de l’autre côté du ruisseau, comme s’ils fuyaient la place. L’endroit est aussi très intéressant pour une autre raison.
Non pas que pour un instant, cette images fixe de relictes colossales, qui montent une pente, semblent être un instantané dans une séquence de film.
Les forêts devaient de toute façon être défrichées.
Il s’agît peut-être d’une coïncidence qu’à cet endroit précis les rangées de menhirs s’orientent légèrement en direction nord-est.
Si telle était la volonté des constructeurs, les lignes auraient pu être maintenu en droite absolue. Si des forêts avaient bloqué le chemin, les arbres incriminés auraient pu être abattus. Si des forêts existaient à cette place, elles devaient de toute façon être défrichées pour ouvrir la voie aux menhirs.

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